updated 8:25 PM CEST, Apr 25, 2016

Tout l'art du cochon

La polémique créée avant la sortie du livre Belle et bête de la philosophe libre-penseuse Marcela Iacub, dans lequel elle romance sa relation avec Dominique Strauss-Kahn, l'ancien patron du FMI, de janvier à août 2012 pose quelques questions. Beaucoup, à l'instar du journaliste politique Jean-Michel Apathie, s'irritent de voir une femme capable d'instrumentaliser un homme, à savoir, dans ce cas, de coucher puis de publier un livre sur leurs relations. En quoi le procédé est-il dérangeant? Combien d'écrivains et de poètes n'ont-ils pas convoqué leurs maîtresses pour rendre leurs écrits plus vivants et plus piquants ? L'agacement de certains éditorialistes ne viendrait-il pas du fait que le rapport public de pouvoir homme-femme est ici inversé ?

Les médias s'agitent d'autant plus que ce nouveau type de lancement marketing littéraire était inattendu : personne ne l'a vu venir, personne ne l'a détecté pas même lorsque l'auteure, qui tient une chronique régulière dans les colonnes de Libération, évoquait DSK (quid de la déontologie journalistique ?). Un secret bien gardé donc qui fait l'effet d'une petite bombe. Mais ne nous y trompons pas, ils ne font que rebondir à la suite du Nouvel Obs qui a sorti le scoop, en s'efforçant de récupérer les miettes pour doper leurs propres ventes.

Marcela Iacub a déjà fait savoir qu'elle n'accorderait pas d'autre interview, ce qui risque d'emballer un peu plus la machine médiatique à grands coups de fantasmes et de supputations. L'auteure n'en est pas à sa première provocation (on se rappelle notamment son rapprochement douteux viol/Auschwitz sur la question du traumatisme) : en janvier 2012, Marcela Iacub publie Une société de violeurs, ouvrage dans lequel elle prend position pour DSK contre le «féminisme punitif». Elle s'est toujours présentée comme une personne défendant la liberté sexuelle, sauf que sa rhétorique est manifestement conforme à l'ordre symbolique y compris celui des sexes et des sexualités. Ce qui est étrange c'est que le Nouvel Obs promeuve une intellectuelle qui propose de décriminaliser le viol alors même que le magazine avait publié, voici quelques mois, le Manifeste des 313, femmes et personnalités qui déclaraient publiquement avoir été violées. 

Les relations entre de nombreuses féministes et cette femme qui se dit libre risquent de se tendre un peu plus. Force est de constater qu'au final, ceux qui auront tiré leur épingle du jeu sont certains médias et l'éditeur : on a cru un instant que les rapports de force allaient évoluer...