Le GGRA dézingue Zofingue
- Écrit par Nathalie Brochard
Samedi 18 avril se tenait la représentation annuelle du spectacle de Zofingue Vaud, une association d'étudiants qui revendique le sexisme comme valeur fondamentale. A cette occasion, le collectif GGRA (Groupe Genre, Réflexion et Action) a mené une action sur scène dans le but de dénoncer la discrimination envers les femmes dont fait preuve le club estudiantin. La vidéo postée par le GGRA a vite fait le buzz. l’émiliE a voulu en savoir un peu plus. Interview collective.
l’émiliE : Pourquoi vous attaquez-vous à cette société d'étudiants?
GGRA : Nous nous en sommes pris-e-s à Zofingue pour dénoncer la non-mixité qu'ils revendiquent et qui est, selon nous, un moyen sexiste de préserver leurs privilèges d'hommes bourgeois dominants. Zofingue représente en effet un réseau de cooptation élitiste pour accéder à des postes et des positions sociales dominantes (une grande partie des membres des "Vieux Zofingiens" sont des médecins, des juristes, des patrons, etc).
Aviez-vous préparé votre action?
Cette action a été le fruit d'une réflexion collective qui a eu lieu en un temps relativement court (environ une semaine). La préparation a été relative du fait que nous n'avions pas beaucoup d'informations sur le spectacle et que nous ne savions pas à quelle réaction nous attendre, une grande place fut donc laissée à la spontanéité. Au final, nous n'avons pas pu lire le texte que nous avions écrit en entier mais sommes satisfait-e-s de ce que nous avons réussi à réaliser.
Que s'est-il passé?
Nous sommes montées sur scène au début du spectacle, à la fin d'une chanson, afin d'y lire un texte dénonçant le sexisme de la société. Les textes furent rapidement arrachés des mains des lectrices par certains des acteurs présents sur scène. Les violences se sont ensuite enchaînées, certain-e-s d'entre nous se sont fait pousser de la scène et molester (coups et strangulations). En voyant la violence disproportionnée inattendue de la part de l'association, nous avons décidé de partir, non sans recevoir de nombreuses insultes et d'autres coups.
Vous êtes plus La Barbe ou Femen?
Ni l'un ni l'autre. Nous agissons en fonction des motivations et de ce qui paraît faisable à celles et ceux qui participent. Nous n'avons pas de dogme de non-violence ou de violence, c'est selon la situation du moment et selon nos forces. Nous revendiquons surtout un féminisme inclusif et luttons donc aussi contre toutes les autres formes de dominations (islamophobie, racisme, homophobie, ...).
La non-mixité de Zofingue a été confirmée par le Tribunal Fédéral, vous en contestez pourtant la légalité?
Ce qui est légal n'est pas forcément légitime. Leur non-mixité n'est pas légitime, peu importe ce qu'en disent les institutions.
Comment expliquez-vous que la liberté d'expression soit jugée supérieure à l'égalité par le TF?
La liberté d'expression défendue par le TF est une liberté subjective qui est utilisée par des personnes qui défendent leurs propres intérêts en faisant fi des rapports de pouvoir. Nous ne sommes de ce fait pas si surpris-e-s qu'une fois de plus les personnes défendues soient celles qui bénéficient d'un statut privilégié au sein de la société.
L'UNIL ou votre collectif, allez-vous faire appel d'un tel énoncé? Allez-vous porter l'affaire devant la CEDH?
Ce n'est pas une question dont nous avons discuté parce que ce n'est pas notre objectif. Le GGRA est un collectif de réflexion et d'action qui cherche à développer une (auto-)critique et à agir indépendamment des institutions.
Quelles sont les prochaines étapes puisque vous affirmez vouloir traquer les privilèges des dominants?
C'est en cours de réflexion. Nous débordons d'idées d'actions et nous avons reçu un gros soutien de la part de beaucoup de personnes très motivées et inspirées, de Lausanne, de Genève, et de l'étranger.
Photo © GGRA